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Chapitre-I


Aspects botaniques et phytochimiques des Annonaceae

 

I-1-Classification de la famille des Annonaceae

 

La famille des Annonaceae appartient à l’ordre des Magnoliales, à la sous-classe des Magnoliideae de la classe des Dicotylédones. Sur la base de la morphologie et de l’habitat, c’est une famille très homogène, présentant un grand nombre de caractéristiques primitives et archaïques et conduisent à considérer ce groupe comme des fossiles vivants au sens Darwinien (Takhtajan, 1997).

 

les Annonaceae sont des plantes ne comprenant que des arbres, des arbustes ou des lianes des régions pantropicales où elles se développent le plus souvent à basse altitude. Par exemple, elles sont très abondantes dans les régions pluviales de l’Afrique de l’Ouest, mais plus rares dans les régions de savane adjacente plus élevées, sauf au bord des rivières. Certaines sont cultivées pour la valeur nutritive de leurs fruits et d’autres utilisées dans des pharmacopées traditionnelles.

 

1-Annonorideae

2-Monodoroideae

Annona L. (110 espèces)

Isolona Engl. (20 espèces)

Asimina Adans. (8 espèces)

Monodora Dunal (15 espèces)

Artabotrys R. Br. (100 espèces)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cananga Hook. F. & Thomson (2 espèces)

Cyathocalyx Chapm. Ex. Hook. F. & Thoms. (38 espèces)

Duguetia A. St-Hil. (70 espèces)

Fissistigma Griff. (70 espèces)

Friesodelsia Steenis (55 espèces)

Goniothalamus Hook.f. & Thomson (115 espèces)

Guatteria Ruiz & Pavon (250 espèces)

Monothotaxis Baill. (56 espèces)

Orophea Bl. (60 espèces)

Polyalthia Blume (120 espèces)

Popowia Endl. (50 espèces)

Rollinia A. St-Hil. (65 espèces)

Uvaria L. (110 espèces)

Xylopia L. (100 espèces)

 

Tableau I-1 : Principaux genres constituant la famille des Annonaceae d’après A. Takhtajan (1997)

 

 

La famille des Annonaceae est composée de 128 genres et de plus de 2050 espèces ; elle est subdivisée en deux sous-familles, Annonorideae et Monodorideae.

La sous-famille des Annonorideae, la plus importante est composée d’environ 2000 espèces. Elle est caractérisée par des carpelles libres et arrangés en spirale.

Les principaux genres sont décrits dans le tableau I-1.

Seuls deux genres africains Monodora et Isolona comprenant environ 35 espèces, ont été séparés pour former la sous-famille des Monodoroideae, sur la base des carpelles qui sont ici unis et arrangés cycliquement (tableau I-1).

 

I-2-Le genre Annona

 

Le genre Annona est composé d’environ 110 espèces. Ce sont de petits arbres, arbustes ou arbrisseaux rhizomateux généralement glabres. Les fleurs sont solitaires ou en inflorescences pauciflores, terminales, oppositifoliées ou extra-axillaires. C’est un genre tropical ou subtropical originaire d’Amérique centrale et certaines espèces sont cultivées dans différentes régions du monde.

Ce genre tire son nom d’« anon », nom du fruit en « taino » langue indienne d’Haïti. Le doublement du « n » d’Annona a été introduit par Linné, sans doute par attraction du latin

« annona » qui signifie récolte de l’année.

Nous décrivons maintenant plus précisément les espèces qui ont fait l’objet de notre étude.

 

I-2-1-Annona cherimola Miller : le chérimolier

 

C’est un arbuste droit de 5 à 9 mètres de haut, à ramilles tomenteuses-ferrugineuses, connu sous les noms vernaculaires de chérimolier en français et « custard apple » en anglais. Ses feuilles sont de couleur vert terne, glabrescentes sur la face supérieure et pubescentes laineuses sur la face inférieure ; elles sont caduques et alternes. Les fleurs odorantes de couleur blanc-verdâtre naissent des bourgeons de la pousse précédente. Les fruits, cordiformes à coniques selon les variétés, ont de 10 à 20 cm de long sur 4 à 10 cm de diamètre et peuvent atteindre un poids de 2 kilogrammes (Fig. I-1). L’épiderme est mince ou épais, avec des protubérances arrondies ou coniques, mais avec des aréoles anguleuses formant des lignes disposées en réseau. La pulpe, blanc-crème, molle contient de nombreuses graines brunes ou noires et brillantes, de 1,5 à 2 cm.

Le chérimolier est originaire des plateaux et vallées inter-andines du Pérou, du Chili et de l’Equateur, entre 1500 et 2200 mètres d’altitude. De l’Amérique tropicale sa culture s’est étendue vers l’Afrique, l’Asie et l’Europe, notamment dans le sud de l’Espagne. Les fruits arrivent à maturité dés le mois de mai et jusqu’au mois d’août.

Cette espèce est utilisée en médecine traditionnelle pour des raisons variées. Ainsi au Mexique, le mélange d’écorce d’A. cherimola et de 1 à 2 graines pulvérisées est consommé avec de l’eau ou du lait pour une action émétique cathartique. Mélangée à de la graisse, la poudre est utilisée contre les poux et aussi dans certaines parasitoses de la peau. La décoction de la peau du fruit est utilisée pour soulager les pneumonies.


 

 

Figure I-1 : Annona cherimola d’après le « Grand livre des Fruits Tropicaux » (Le Bellec, 1999)

 

 

I-2-2-Annona muricata L. : le corossolier

 

Le corossolier est un arbre pouvant atteindre 6 à 8 m de haut, à ramilles pubescentes ferrugineuses devenant glabres. Les feuilles sont coriaces d’un vert luisant plus ou moins acuminées. Les fleurs en forme de clochette apparaissent soit en partie terminale d’un rameau, soit directement sur une branche plus âgée. Les fleurs sont blanchâtres, solitaires à pédicelle épais. Le fruit (le corossol) est allongé, recouvert de pointes molles de 1,2 mm de long, vert devenant vert-foncé à maturité, pesant jusqu’à 3 kg et pouvant atteindre 20 cm de longueur (Fig. I-2). A maturité sa peau verte perd de son brillant et peut prendre une teinte grisâtre. Il a une pulpe blanche, fibreuse, agréablement parfumée, d’un goût acide.


Figure I-2 : Annona muricata d’après le « Grand livre des Fruits Tropicaux » (Le Bellec, 1999)

 

Le corossolier est une espèce pantropicale, originaire des terres basses d’Amérique centrale et plus particulièrement de Colombie. Cette espèce se trouve dans de nombreuses régions du monde : en Afrique, en Inde et surtout dans le sud-est asiatique. Dans cette dernière région, la transformation du fruit en jus est une industrie importante. Le fruit arrive à maturité deux fois par an, tout d’abord d’avril en juin, au moment de la période de floraison de la deuxième production, et ensuite d’octobre à décembre.

Au corossolier, sont attribuées de nombreuses vertus médicinales : son jus est considéré comme tonique et aurait des propriétés vermifuges. Ses feuilles et ses bourgeons seraient calmants et efficaces contre la toux et la fièvre. Au Sénégal l’infusion de feuilles  d’A. muricata est considérée en médecine populaire comme hypnogène, béchique et fébrifuge. En Guadeloupe, la décoction de racine est administrée dans les empoisonnements occasionnés par des poissons vénéneux, ainsi que pour traiter l’épilepsie et les crises nerveuses et enfin contre les parasites des volailles.

 

I-2-3-Annona reticulata L. : le « cœur de bœuf »

 

C’est un arbuste buissonnant très ramifié à la base et qui peut atteindre 8 mètres de haut. Les feuilles, alternes, simples, pendantes, vert-foncé, ont dessous une nervure médiane saillante et des nervures secondaires leur donnant un aspect ondulé, et elles mesurent en moyenne de 10 à 15 cm de long sur 3 à 5 cm de largeur. Les fleurs sont solitaires, jaune-pâle, et apparaissent par petites grappes sur les jeunes rameaux. Son fruit rappelant un cœur de bœuf, peut peser de 250 g à 1 kg, avec un diamètre de 9 à 10 cm (Fig. I-3). Sa peau est mince, brun-rougeâtre à maturité, et légèrement divisée en écailles pentagonales sans protubérances, mais avec des aréoles anguleuses formant des lignes disposées en réseau. Le fruit est comestible, mais médiocrement apprécié. La pulpe blanchâtre, est assez fade, épaisse et crémeuse, avec de nombreuses graines, brillantes, brunes ou noires et coniques de 1,5 à 2 cm.

Le cœur de bœuf est une espèce pantropicale originaire des régions basses d’Amérique tropicale. Il est surtout répandu au Brésil dans les régions de basse altitude, du littoral à      500 m, mais aussi en Afrique, en Asie et en Australie. Le cœur de bœuf produit des fruits d’août à septembre.

Le fruit vert d’A. reticulata est considéré comme antidiarrhéique, antidysentérique et anthelmintique. Les feuilles et les fruits verts sont astringents ce qui expliquerait leur utilisation en tisane contre les diarrhées et les dysenteries, mais aussi comme insecticide et vermicide.

 

 

Figure I-3 : Annona reticulata d’après le « Grand livre des Fruits Tropicaux » (Le Bellec, 1999)

 

I-2-4- Annona senegalensis Pers. : pomme cannelle du Sénégal ou “digor” en woloof

 

C’est un arbuste ou un sous-arbrisseau de 1 à 6 m de hauteur, à fût grêle avec des rameaux glabres et des ramilles tomenteuses, roux ferrugineux. Les feuilles alternées peuvent atteindre 12 sur 8 cm, et même plus sur les rejets, et sont nettement pétiolées, glabres ou pubescentes, elliptiques, arrondies aux deux extrémités. La face supérieure est finement pubérulente, la face inférieure est couverte sur toute la surface d’un tomentum  épais, de poils très courts et crépus, gris argentés. Les nervures latérales sont nettement proéminentes sur le  dessous de la feuille. Les fleurs sont solitaires ou géminées, avec des pétales jaune-verdâtre charnus.

Les fruits sont subsphériques, jaunes à maturité, de 4 à 5 cm de long avec des carpelles d’une coloration plus foncée. Le syncarpe est jaune orangé à maturité, ovoïde ou globuleux, aréolé, légèrement tuberculé, de 3 à 5 cm de diamètre, avec de nombreuses graines oblongues, aplaties longues de 8 à 11 mm et larges de 4 à 5 mm, lisses, brun clair.

Ils renferment de nombreuses graines oblongues, aplaties, longues de 8-11 mm, larges de 4-5 mm à testa lisse, brun clair. L’arille pectiné est long de 2 mm (Fig. I-4).

Annona senegalensis Pers. est très largement répandue dans les savanes soudano-guinéennes et s’étend du Sénégal au Soudan anglo-égyptien vers l’Est, et tout le long de la côte orientale, jusqu’à Madagascar.

Les tiges ou les rameaux feuillés d’A. senegalensis sont utilisés au Sénégal en macération comme antidiarrhéique et antidysentérique. Les feuilles et les racines sont dotées de propriétés fébrifuges, antitussives, sédatives des affections respiratoires, décongestionnantes, antiseptiques, diurétiques, antiinfectueuses, cicatrisantes et décontracturantes, d’où son emploi dans le paludisme, les maladies respiratoires (du coryza à la pneumonie), les oreillons, les maladies oculaires, les dermatoses, les ulcères, les rhumatismes, la blennorragie dans la pharmacopée sénégalaise.

 

Figure I-4- Annona senegalensis Pers. : 1,  feuille et fleur ; 2, 3, 4, 9, 10, feuille et pubescence de la face inférieure ; 5, coupe longitudinale de la fleur ; 6, étamine ; 7, carpelle et coupe ; 8, graine ; 11, fruits.                (Le Thomas, 1969, 1981 et 1996).

 

I-2-5- Annona squamosa L. : l’attier ou pomme cannelle

 

L’attier est un petit arbre buissonnant de 3-6 m de haut. Les feuilles sont simples, alternes lancéolées, retombantes et sont de couleur verte plus ou moins soutenue sur la partie supérieure, avec des reflets glauques. Les fleurs sont solitaires, pendantes, axillaires, de couleur blanchâtre ou jaune verdâtre. Elles comportent de nombreuses étamines et carpelles.

Les fruits sont globuleux, vert-jaune à gris-rosé, l’épiderme étant composé de protubérances écailleuses atteignant 8 cm. La pulpe blanche est très douce, sucrée, parfumée et contient de nombreuses graines.

Annona squamosa L. (pomme-cannelle) est une espèce pantropicale, originaire des terres basses d’Amérique tropicale. Elle est aujourd’hui cultivée dans de nombreux pays tropicaux. Le fruit comestible à pulpe blanche et molle, très sucrée arrive à maturité durant les mois d’avril à juin.

En médecine populaire sénégalaise, les feuilles d’A. squamosa sont employées en cataplasme pour traiter les infections de peau. Les bourgeons, écorces et racines sont astringents et utilisés contre la diarrhée et la dysenterie. Les graines qui contiennent des alcaloïdes et des acétogénines sont utilisées comme insecticide contre les poux.

 

Figure I-5 : Annona squamosa d’après le « Grand livre des Fruits Tropicaux » (Le Bellec, 1999)

 

II-Constituants chimiques des Annonacées : travaux antérieurs

 

Bien que cette famille soit riche d’environ 2100 espèces, elle est considérée comme l’une des familles de plantes tropicales les moins étudiées du point de vue phytochimique.

Les études ont eu un grand développement à partir de 1985 et ont porté sur les différentes parties de ces plantes. Cet intérêt est principalement dû à la découverte des acétogénines, une classe de substances naturelles avec une large variété d’activités biologiques. Avant 1982, les recherches étaient plutôt focalisées sur les alcaloïdes dérivés de l’isoquinoléine comme le montre une revue de Lebœuf et al. (1982).

Actuellement, plus de 700 métabolites secondaires, dont environ 400 acétogénines, ont été décrits pour cette famille. Les principaux constituants des Annonaceae peuvent ainsi se répartir en 3 groupes : les acétogénines, les alcaloïdes et les autres classes de composés comprenant les carbohydrates, les lipides, les amino-acides, les polyphénols et les autres composés aromatiques, les huiles essentielles et les terpénoïdes (Jolad et al., 1982).

Comme cela a été présenté ci-dessus, beaucoup d’espèces de cette famille sont utilisées dans des médecines traditionnelles pour de multiples raisons. Pour autant, la plupart des études phytochimiques avant 1985, n’avaient pas essayé d’expliquer les raisons de ces usages en utilisant des tests de bioactivité. Une telle approche a été développée par Jolad et al. en 1982, qui a ainsi mis en évidence l’activité antitumorale d’un extrait éthanolique des racines d’Uvaria accuminata sur la leucémie murine P388 et a conduit à la caractérisation de l’uvaricine comme composé responsable de cette activité.

L’uvaricine a été le premier exemple d’une nouvelle classe de composés organiques biologiquement très actifs et maintenant connus sous le terme d’acétogénines.

 

II-1–Acétogénines

 

Les acétogénines des Annonaceae sont une classe importante de composés naturels avec des propriétés antihelmenthique, cytotoxique et antitumorale, antimicrobienne, antipaludique, antiparasitaire, antiprotozoaire, immunosuppressive, et sont une source de modèles pour des médicaments potentiellement anticancéreux et de pesticides.

Elles ne sont produites que par quelques genres de cette famille telle l’annonacine A d’Annona squamosa et l’aromine A d’A. cherimola, l’uvaricine d’Uvaria accuminata et telle la pyranicine de Goniothalamus giganteus (Fig. I-6). En 1990, seules 28 acétogénines étaient connues provenant de 28 espèces, environ 220 en 1996 de 26 espèces, et actuellement environ 400 acétogénines sont décrites.

Du fait de l’isolement d’un grand nombre de plus en plus grand d’acétogénines et des nombreux essais de cytotoxicité sur des cellules tumorales, les potentialités des diverses acétogénines sur plusieurs lignées cellulaires de tumeurs humaines solides, un certain nombre d’entre elles avec des caractéristiques structurales précises ont montré une sélectivité remarquable à l’égard de certains cancers, comme le cancer de la prostate. Concernant leur mode d’action, il a été montré qu’elles sont de puissants inhibiteurs de la NADH / ubiquinone oxydoréductase, qui est une enzyme essentielle dans le complexe I du transport d’électrons de la phosphorylation oxydative dans les mitochondries, avec pour conséquence la privation d’ATP.

Du point de vue structural, les acétogénines sont des composés en C-32/C-34 qui sont caractérisées par une longue chaîne aliphatique linéaire portant en partie terminale un cycle g-lactonique, a-b insaturé méthylé. Un, deux ou trois cycles tétrahydrofuraniques (THF) sont localisés le long de la chaîne hydrocarbonée, ainsi qu’un certain nombre de fonctions oxygénées : (hydroxyles, acétoxyles, cétones, époxydes) et des doubles liaisons. Récemment des acétogénines à pont tétrahydropyrane (THP), telle la pyranicine, ont été isolées.

Les acétogénines sont classées en plusieurs sous-groupes en fonction : i - du nombre de cycles tétrahydrofuraniques qu’elles renferment et de leur proximité dans la structure selon qu’ils soient adjacents ou non : mono-THF, bis-THF adjacents, bis-THF non-adjacents, tri-THF et acétogénines non classiques (THP et composés à pont THF hydroxylée, ii - de la présence de fonctions époxydes, alcools secondaires, cétones…, iii - de considérations sur les substitutions du cycle lactonique.

Les principaux motifs structuraux sont représentés dans la figure I-7.

 

Annonacine A extraite des graines d’Annona squamosa

 

Aromine A extraite des écorces d’Annona cherimola

 

 

Uvaricine extraite des racines d’Uvaria accuminata

 

Pyranicine extraite des écorces de Goniothalamus giganteus

 

Figure I-6 : Exemples d’acétogénines

 

 

 

 

Figure I-7 : Eléments structuraux des squelettes des acétogénines d’Annonaceae : 1, Mono-THF ; 2, bis-THF adjascent ; 3, bis-THF non adjascent ; 4, non-THF ; 5, cycle pyranique ; 6, 7, 8, types de lactones terminales

 

Les acétogénines sont doués d’activités antitumorales et cytotoxiques, telle l’annonacine qui agit par inhibition de la tubiline, et d’activités pesticides , telle l’annonine qui montre une grande activité ovicide et larvicide sur la Drosophile. Une activité antimicrobienne a été également notée pour certains composés telles l’asimicine, l’annonacine et la goniothalamicine.

 

II-2–Alcaloïdes

 

Plus de 160 alcaloïdes ont été à ce jour caractérisés dans les Annonaceae.

Ils ont été principalement caractérisés dans les genres Annona, Xylopia et Enantia. La plupart d’entre eux dérivent de l’isoquinoléine et se répartissent en plusieurs groupes.

 

Isoquinoléines simples.

 

Le salsolinol, une simple tétrahydroisoquinoléine a été isolée d’A. reticulata avec la dopamine son précurseur biogénétique. La seule isoquinolone décrite dans les Annonaceae est la corydaldine extraite de l’écorce de tronc d’Enantia polycarpa.

 

 

 

       Salsolinol (Annona reticulata)                 Corydaldine (Enantia polycarpa)

 

Benzyltétrahydroisoquinoléines.

 

Plus d’une dizaine de composés dérivés de benzyltétrahydroisoquinoléines ont été extraits d’Annona et de Xylopia, les plus fréquents étant la réticuline et la polycarpine.

 

                Réticuline (Annona sp. et Xylopia sp.)                  Polycarpine (Enantia polycarpa)

 

Bisbenzylisoquinoléines et bisbenzyltétrahydroisoquinoléines.

 

Une douzaine d’alcaloïdes de cette classe issue de la dimérisation de benzylisoquinoléines ont été isolés, principalement à partir des genres Isolona et Phaeanthus, telle la curine ou la phlébicine qui elle possède un motif structural plus rare.

 

Phlébicine (Crematosperma polyphlebum)

 

Protoberbérines et tétrahydroprotoberbérines.

 

Environ quinze structures de cette classe ont été caractérisées dans les Annonaceae telles la palmatine produite par diverses espèces d’Enantia et la berbérine de Xylopia.

 

                     Berbérine (Xylopia polycarpa)                     Palmatine (Enantia chlorantia)

 

Aporphinoïdes.

 

C’est le groupe le plus fréquemment rencontré chez les Annonaceae, puisque près d’une centaine d’alcaloïdes de cette classe ont été identifiés dans des genres très divers de cette famille. Ils peuvent être des aporphines au sens strict comme l’anonaine caractérisée dans diverses espèces d’Annona ou des oxoaporphines telle la liriodénine ubiquitaire et assez fréquemment décrite.

 

             Anonaine (Annona sp.)        Liriodénine (Annona et Xylopia sp.)  Uvariopsine (Uvariopsis sp.)

 

Phénanthrènes.

 

Une dizaine d’alcaloïdes dérivés du phénanthrène ont été caractérisés, telle l’uvariopsine produite par de diverses espèces d’Uvariopsis.

 

Autres alcaloïdes.

 

Des alcaloïdes autres que ceux dérivés de l’isoquinoléine ont été décrits dans cette famille. De façon surprenante, la caféine a été décrite comme l’un des constituants principaux des graines d’A. cherimola et la quinidine de l’écorce de diverses Enantia.

         Un dernier groupe est constitué d’isoprényl- et sesquiterpényl indoles, tels l’isoprénylindole et le polyalthénol qui est produit par divers Polyalthia africains.

 

             Isoprénylindole (Monodora tenuifolia)                Polyalthénol (Polyalthia sp.)

 

Au total, les alcaloïdes dérivés de l’isoquinoléine apparaissent comme les alcaloïdes majeurs des Annonaceae. Ces composés sont doués de propriétés antiparkinsoniennes et d’activités antitumorale, antibactérienne et antifongique.

 

II-3-Autres classes de composés

 

Les Annonaceae contiennent d’autres composés non alcaloïdiques. Ce sont essentiellement des monocarbohydrates (50 %), des sesquiterpènes (20 %) qui ont été mis en évidence dans les fruits et les graines des annones.

Les fruits contiennent d’autres composés tels que glucides (16 %), vitamine-C      (22,5 %), calcium, protéines, phosphore, fer, thiamine, niacine, riboflavine, magnésium, acide ascorbique et carotènes.

Les composés minoritaires sont des esters aliphatiques, des monoterpénoïdes oxygénés, des sesquiterpénoïdes oxygénés, et des diterpénes (Lebœuf et al.,1982).

 

Les flavonoïdes.

 

Plusieurs flavonoïdes ont été isolés des graines d’Annona, c’est le cas de la quercétine isolée des feuilles d’A. glabra, d’A. senegalensis et d’Asimina triloba.

Quercétine (A. glabra, A. senegalensis, Asimina tribola)

 

 

 

Les terpénoïdes.

 

Le parfum de nombreuses Annonaceae est dû à la présence d’huiles essentielles composées de monoterpènes, de sesquiterpènes et de dérivés aromatiques. A titre d’exemple, l’huile essentielle des graines d’Annona squamosa contient principalement de l’a-pinène et du b-caryophyllène, tandis que les terpènes prédominants de la peau des fruits sont l’a- et le b-pinène, le limonène, le farnésène et le trans-ocimène. Le camphre et le bornéol, mais aussi le caryophyllène ont été caractérisés dans les racines et l’écorce de cette espèce.

Enfin de nombreux diterpènes de type kaurane ont été identifiés dans différentes espèces d’Annona, ou de Xylopia, tel l’acide xylopique des graines de X. aethioptica, le kaur-16-én-19-ol d’A. squamosa et les acides stachanoïque et kaur-16-èn-19-oïque d’A. senegalensis. Le criblage phytochimique a mis en évidence des stérols et des triterpènes dans de nombreuses espèces, en particulier les ubiquistes b-sitostérol, stigmastérol et campestérol.

 

 

II-4-Les cyclopeptides

 

Récemment, dans le cadre d’une recherche de peptides cycliques dans les plantes, deux équipes ont isolé à partir des graines de trois espèces asiatiques du genre Annona des cyclopeptides de 6 à 9 résidus dont les séquences ont été déterminées. Aucune donnée biologique ou conformationnelle n’a été décrite.

Ainsi, s’intéressant aux constituants des Annona de Chine, le groupe de C.M. Li a isolé les annomuricatines A et B d’A. muricata, les glabrines A-D d’A. glabra et l’annosquamosine A d’A. squamosa. Puis, le groupe de H. Morita et J. Kobayashi au Japon, étudiant à nouveau les graines d’A. squamosa a caractérisé les cyclosquamosines A à G en plus de l’annosquamosine A (Tableau I-2).

 

 

Annona muricata

Annomuricatine A :                  cyclo(Pro-Phe-Val-Ser-Ala-Gly-)

Annomuricatine B :                  cyclo(Pro-Asn-Ala-Trp-Leu-Gly-Thr-)

Annona squamosa

Cyclosquamosine A :   cyclo(Pro-Gly-Ser-Phe-Gly-Pro-Val-)

Cyclosquamosine B :               cyclo(Pro-Pro-Ile-Thr-Gly-Leu-Met-Gln-)

Cyclosquamosine C :               cyclo(Pro-Pro-Ile-Thr-Gly-Leu-Mso-Gln-)

Cyclosquamosine D :               cyclo(Pro-Gly-Gly-Val-Leu-Ser-Tyr-Tyr-)

Cyclosquamosine E :               cyclo(Pro-Gly-Gly-Val-Leu-Ser-Tyr-Tyr-Tyr-)

Cyclosquamosine F :               cyclo(Pro-Ala-Leu-Thr-Thr-Tyr-Gly-Ala-)

Cyclosquamosine G :               cyclo(Pro-Met-Thr-Ala-Ile-Val-Gly-Tyr-)

Annosquamosine A :                cyclo(Pro-Mso-Thr-Ala-Ile-Val-Gly-Tyr-)

Annona glabra

Glabrine A :                             cyclo(Pro-Gly-Leu-Val-Ile-Tyr-)

Glabrine B :                             cyclo(Pro-Mso-Val-Ala-Val-Tyr-Gly-Thr-)

Glabrine C :                             cyclo(Pro-Gly-Tyr-Val-Leu-Ala-Leu-Val-)

Glabrine D :                             cyclo(Pro-Glu-Pro-Pro-Val-Tyr-Gly-)

 
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Tableau I-2 : Cyclopeptides isolés des Annona par d’autres équipes









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